Travaillé comme un joyau, cet objet est un chef d’œuvre de verrerie. Et pourtant il y a peu de laboratoires de chimie où il ne trouve pas sa place. Long tube de verre, lisse sur sa paroi extérieur et hérissé de pics pointant vers le centre et le bas sur sa partie intérieur. On nomme simplement cette colonne du nom de son créateur Henry Vigreux.
Chef de l’atelier de verrerie de la faculté de science de Paris Sorbonne, il décrit la première fois cet objet en 1904. Vous lisez bien, un chef d’atelier de verrerie dans une faculté de science. En effet, il était indispensable pour tout laboratoire de chimie d’avoir des artisans capables de fabriquer sur mesure tous leurs instruments. Cette colonne fut conçue pour permettre la séparation de produits chimiques ayant des températures d’ébullition différentes, car une difficulté se cache derrière la théorie. Lorsque l’on chauffe un liquide, deux phénomènes de vaporisation tendent à le rendre à l’état de gaz :
- L’ébullition, qui est un processus qui fait passer de l’état liquide à gazeux, à une température spécifique au composé chimique. La transition se fait à cette température spécifique constante ; à plus faible température le produit est à l’état liquide, à plus haute il est à l’état gazeux.
- L’évaporation, qui est un processus qui essaye de créer un équilibre entre les états gazeux et liquide du composé. À chaque température, il existe un équilibre stable entre les deux états.
Pour séparer un mélange de composés chimique, nous le chauffons. Ainsi à la température où le premier composé chimique entre en ébullition, il transite vers l’état gazeux. Les autres produits, soumis quant à eux à l’évaporation cherchent l’équilibre en devenant, pour une petite partie, des gaz.
Les produits à l’état gazeux n’ont d’autre choix que de passer par la colonne. C’est à ce moment précis que la création de monsieur Vigreux montre son potentiel :
- Ceux issus d’une évaporation se condensent en grande partie sur les pics, car ils cherchent toujours leur équilibre liquide/gaz ; ainsi, par accumulation de liquide sur chaque pic, une goutte se forme qui retourne au récipient initial.
- Le produit issu de l’ébullition, quant à lui, étant à une température suffisante pour être à l’état gazeux ne cherche pas à se condenser sur les pics et monte ainsi dans la colonne. Malgré tout, une faible partie se condense au contact de la verrerie.
Ainsi en montant dans la colonne, les gaz rencontrent un nombre croissant de pics, augmentant ainsi la pureté du produit à séparer à chaque palier. La colonne de Vigreux, remplacé par des techniques plus performantes lorsqu’il s’agit de traiter de grands volumes par exemple dans la séparation des constituants du pétrole ; reste en laboratoire, par sa qualité et sa simplicité d’utilisation, un instrument essentiel pour la séparation de mélange.